Les défis du diagnostic et des soins de santé
Par Immaculée Kilolo
Elle était enceinte pour une seconde fois et avait toute la vie devant elle. 28ans, mariée depuis 3ans à un banquier, un homme aimant, en train d’élever une petite fille de presque 2ans, un boulot qui ne payait pas autant que voulu mais dont elle se contentait, Marianna avait le désir d’avoir un petit frère pour sa petite fille. Et cela tombe bien, elle s’apprêtait à accoucher d’un garçon.
La famille était si pleine de joie qu’elle a voulu mettre toutes les chances de son côté : Elle décida de voyager pour avoir la compagnie de toute sa grande famille biologique à l’accouchement : Marianna habitait Bukavu avec sa petite famille, elle s’est donc déplacé à Goma pour l’accouchement.
Quelque jours après, alors qu’elle mettait son fils au monde, elle est morte, elle et le bébé aussi.
Elle ne devrait pas perdre vie, en donnant vie !
Ceci est une histoire, parmi tant d’autres que l’on vit au quotidien. J’ai la boule au ventre à l’idée de donner vie et cela peu importe la ville où l’on se trouve en République Démocratique du Congo.
La mortalité maternelle en RDC demeure un enjeu crucial qui nécessite une attention urgente. Malgré les efforts déployés, le taux de mortalité maternelle reste élevé, avec des chiffres alarmants. On estime 547 décès pour 100 000 naissances vivantes (2020), ce chiffre dépasse la cible des objectifs de développement durable (ODD).
La mortalité maternelle est un problème majeur, avec plusieurs femmes décédant chaque heure des suites de complications liées à la grossesse et à l’accouchement.
Mais pourquoi les femmes de la RDC subissent elles un tel fléau ? Quelques éléments de réponse ci dessous :
Accès aux Services de Santé Reproductive, Maternelle et Infantile
L’accès à des soins de qualité reste un défi majeur. Les services offerts sont encore insuffisants et de faible qualité. Plusieurs examens de grossesse obligatoires (test de trisomie 21, auscultation cardiaque du fœtus, sérologie toxoplasmique, dépistage de l’antigène HBs, recherche d’anticorps irréguliers, …) ne se pratiquent pas dans nos villes congolaises, et ceux qui sont possibles à faire coûte énormément chers et jusque là il n’existe pas de couverture santé ou remboursement par la sécurité sociale en RDC.
Les femmes enceintes ont souvent recours aux matrones (accoucheuses traditionnelles) et à l’automédication, ou pire, se trouvent dans des camps de déplacés, où les installations sanitaires sont rares en raison des conflits armés ou communautaires.
Barrières Financières
Les dépenses de santé sont souvent supportées directement par les ménages, ce qui peut avoir des conséquences catastrophiques pour les familles vulnérables. La plupart de familles sont des familles nombreuses et les coûts liés à la maternité sont énormes et affectent drastiquement le budget des ménages. Dans plusieurs villes du pays, l’accouchement par voie basse est préféré vu le coût réduit. Ainsi, les autres moyens d’accouchement sont évités, parfois au péril de leurs vies
L’accouchement par césarienne coûte plus ou moins Deux-cents dollars américains, la péridurale plus de Trois-cents dollars américains ; ceci dépend aussi de la ville où l’on se trouve : dans la capitale du pays, Kinshasa, l’accouchement coûte encore plus cher que dans le reste du pays.
Renforcement du Système de Santé
Il est essentiel de renforcer la gouvernance du système de santé, d’améliorer la qualité des soins et d’assurer un accès équitable aux services de santé pour toutes les femmes. Former davantage de professionnels de la santé, en particulier les sages-femmes, pour améliorer la qualité des soins prénatals et postnatals, est une mesure indispensable.
Une expression moqueuse dit parfois : « il faut tellement prendre notre santé au sérieux, ceux qui trichaient à l’école sont entrain de devenir médecin. »
Il est important de sensibiliser les femmes et leurs familles sur l’importance des soins prénatals, des examens réguliers et des diagnostics précoces. Renforcer les infrastructures de santé et les systèmes de référence pour garantir un accès rapide aux soins et aux diagnostics.
Challenges liés aux Diagnostics
La mortalité maternelle est souvent exacerbée par des erreurs de diagnostic et un manque d’information. Les femmes enceintes et les jeunes mères peuvent être confrontées à des difficultés pour accéder à des soins de qualité et à des diagnostics précis. Et ceci est général pour toutes les femmes enceintes ou pas, nos hôpitaux ne sont pas encore à mesure de diagnostiquer plusieurs maladies. Ce qui contraint tout le monde ayant un peu de moyen d’aller soit au Rwanda, soit Kenya, voire en Inde, selon les moyens pour être sûr d’être bien diagnostiquer.
Prenons des mesures concrètes et décidons de diminuer, voire même stopper , ce taux de mortalité maternelle ; nos mamans, nos sœurs, nos filles et nous-même femme ne doivent pas perdre la vie en voulant la donner.
Retrouvez dans un prochain numéro : « Mortalité féminine : Les défis du diagnostic et des soins de santé », avec deux histoires choquantes réelles de deux femmes, d’une décédée et d’une autre survivante. Rendez-vous sur UJN Elle TV !